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Tale S conférence d’Albert Fert Prix Nobel 2007

Dans le cadre des fêtes de la Science, les deux classes de Terminales S ont pu assister,le lundi 6 octobre 2014, à une conférence donnée par le prix Nobel 2007 Albert Fert, ayant pour titre : « De la recherche fondamentale à l’innovation ».
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Dans l’amphithéâtre Liard de la Sorbonne, une salle historique aux murs décorés de boiseries, les portraits des plus grands penseurs français se trouvent réunis : nous pouvons citer en désordre Blaise Pascal, René Descartes, Jacques-Bénigne Bossuet, etc. Quel meilleur endroit pour discuter de recherche fondamentale, que ce lieu qui accueille depuis le XIXₑ siècle les soutenances de thèse des jeunes chercheurs ?

Monsieur Fert, actuellement enseignant à Paris-Sud-Orsay et chercheur au CNRS-Thalès, a commencé son exposé par un bref récapitulatif de son parcours de scientifique, à travers lequel il nous a expliqué que son métier, loin de l’image figée et poussiéreuse que nous en avons, est avant tout un métier de création, d’imagination, et de remise en cause perpétuelle des modèles. Albert Fert a vraiment souligné le fait que la recherche fondamentale est l’action de remise en cause d’un savoir considéré comme largement établi, dans le but d’arriver à la stabilité de nouvelles connaissances, connaissances que nous pouvons finalement utiliser pour inventer, pour innover.

Pour illustrer ses dires, Albert Fert a développé quatre exemples qui mettent très bien en scène les relations qui existent entre la recherche fondamentale et l’innovation.

Le premier exemple reprend la propre découverte de notre conférencier : l’effet GMR, ou de magnétorésistance géante. Cet effet est observé lorsque des atomes sont placés suivant une alternance de fines couches d’atomes ferromagnétiques, de 3 atomes d’épaisseur, avec des couches d’atomes non magnétiques. Sous l’effet d’un champ magnétique extérieur, la direction du spin des électrons du métal ferromagnétique devient parallèle dans toutes les couches de métal magnétique, ce qui provoque un alignement de toutes les couches de la multicouche magnétique. La résistance électrique de celle-ci en est grandement diminuée, ce qui permet à des électrons de franchir ce “mille-feuille” magnétique. Un dispositif placé derrière la multicouche peut alors détecter ces électrons. Ce concept a été pensé par Albert Fert en 1970, époque où il n’avait aucune possibilité de vérifier expérimentalement sa découverte. Il dut attendre les années 90, et le début de son partenariat avec l’entreprise Thompson, une pionnière de la micro-électronique, pour que son modèle soit vérifié. Cette collaboration permit le développement de nombreuses applications innovantes auxquelles Albert Fert n’avait pas pensé : d’une part l’augmentation de la capacité de stockage des disques durs, la découverte de la « spintronique », technologie basée sur la notion de spin des électrons ; et d’autre part tout ce qui concerne les technologies nomades (téléphones portables, iPod,…), que le prix Nobel ne pouvait pas prévoir. Ainsi, la recherche fondamentale sur la conduction électrique dans les métaux magnétique a conduit à de nombreuses innovations dans des domaines assez divers.

Le deuxième exemple cité par notre conférencier découle naturellement du précédant : après avoir réussi à multiplier par 1000 la capacité de stockage de l’information par nos disques durs grâce à l’effet GMR, les chercheurs se sont rendus compte que cette façon de fonctionner était trop coûteuse en énergie. En effet, aujourd’hui, 07% de la consommation électrique dans le monde est due au fonctionnement des ordinateurs. Ces ordinateurs utilisent tous ce qu’on appelle des RAM (mémoires d’accès rapide), pour accéder à l’information. Ces RAM sont basées sur l’effet GMR. Leur défaut est la nécessité de les alimenter constamment en énergie pour maintenir le champ magnétique externe. Les MRAM, une nouvelle technologie en cours de développement, utilisent un transfert de spin qui ont la même direction, et qui vont être inversés par un passage à travers trois couches successives : deux couches magnétiques, séparés par une couche non magnétique. A l’échelle nanométrique, en effet, les électrons réussissent à passer la couche non magnétique, grâce à ce qu’on appelle « l’effet tunnel », ce qui a cependant l’effet d’inverser le spin des électrons. Cela provoque un changement d’aimantation d’une des deux couches magnétiques. L’état d’aimantation de cette couche est lu par un dispositif qui utilise lui-aussi l’effet GMR. Cette application est toujours en cours d’étude, mais permettrait de réduire de 40% la consommation de nos ordinateurs, ce qui représente une économie d’énergie non négligeable.

Albert Fert a ensuite évoqué la possibilité, toujours en étude, de créer des nouveaux nanomatériaux qui imiteraient la plasticité des synapses de notre cerveau, permettant ainsi la création d’ordinateurs plus performants, ayant une mémoire adaptée et adaptable à l’utilisation qui en est faite. Ces nanomatériaux utilisent eux aussi l’effet GMR et l’effet tunnel.

Notre conférencier a conclu sa série d’exemples par l’analyse des perspectives qu’offre la récente mise au pont d’un nouveau matériau appelé graphène, un empilement de feuilles monoatomiques de carbone, plus résistant que l’acier, plus conducteur, et transparent. Pouvant non seulement être utilisé pour protéger les avions de la foudre, le graphène offre un matériau de choix pour le développement de la « spintronique », car il présente des propriétés remarquables pour le transfert de spin. Le graphène pourrait ainsi permettre la mise sur le marché des MRAM. 

La conférence s’est terminée par le rappel du caractère créatif de la recherche fondamentale. Albert Fert a ajouté que ce travail est avant tout un travail d’équipe, une équipe qu’il conçoit comme un rassemblement de personnes aux capacités variées ayant toutes en commun le goût de l’imagination.
Camille B Tale S


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